Lundi 18 janvier 2021 - 7 H 30 : fort afflot de la Dore
Echelle des crues du pont du Veurdre : + 1,36 m.
Ça monte doucement encore à Châtel-de-Neuvre et l'Allier est à l'étale à Saint-Yorre. Coudes stable. A suivre...
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Echelle des crues du pont du Veurdre : + 1,36 m.
Ça monte doucement encore à Châtel-de-Neuvre et l'Allier est à l'étale à Saint-Yorre. Coudes stable. A suivre...
Echelle du pont du Veurdre : + 0,99 m.
Le chantier en extérieur (avec "distanciation sociale") continue. Cette semaine Claire, "gouyard" ou scie "jap" en mains, à rejoint l'équipe. Avant midi, la liaison rivière / chantier à bateaux est à nouveau rétablie, avant que la neige qui apaise les maux du monde fasse avec magie son apparition. Le bocage quelques instants ralentit, peut être même la rivière aussi et les sons se font plus doux.
Trop vite nous apprenons qu'une pluie remplacera dans la nuit ces beaux flocons. Cette connaissance des heures à venir nous oblige dans le vent glacial, à faire le tour de nos bachots, futreaux et toues pour les délester de la neige.
Dimanche matin
Rivière franchement à la hausse (+ 1,20 m), le site gouvernemental Vigicrues nous informe que c'est la Dore qui "donne". Comme prévu, le blanc manteau est maintenant un songe.
Aux derniers éclats du jour, la rivière nous commande de déplacer le train de bateaux et de le mettre à l'ancre à l'abri des "verdiaux" qui font, contre la violence des flots montants, office de tampon.
Cote pont du Veurdre : + 0,05 m.
2021 sera féminin. En cette fraîche matinée, vivifiée d'une bise courant le val à l'envers, point de navigation mais les bateaux ne sont pas loin. Le "sentier de la batellerie" comme on l'appelle, est l'objet d'un grand débroussaillage. Cette petite liaison de bocage joint en un éclair la rivière au hangar à bateaux. Un chemin creux bourbonnais en miniature avec les mêmes atouts (abri du vent, de la pluie, du soleil et discrétion) tout en gardant l'oeil sur la rivière. Caroline, Nelly et Cécile ont oeuvré toute cette journée, close à la nuit tombée d'un apéritif dînatoire, au meilleur Champagne et ses coupes, oui ; une attention de Caroline dont les voeux sont bien sûr de se revoir tous bientôt. La suite sous les étoiles, c'est un pâté maison de Cécile et les chips de Nelly... Le bonheur quoi !
Le chantier continue samedi prochain.
Echelle du Veurdre : + 0,28 m.
En ce premier samedi de la nouvelle année et qui, nous l'espérons pour tous, augure de meilleurs jours, un équipage féminin à pour la première fois ressenti toute la puissance des 50 m2 de la voile du futreau Hors du Temps. Cécile et Nelly n'ont pas craint la bise soutenue de nord pour s'embarquer à contre-courant de la rivière Allier. Accompagnées de Manu qui a largement rappelé les consignes de prudence propres à cette technique de navigation traditionnelle et néanmoins hivernale, elles ont pris connaissance des différents éléments constituant un futreau "armé" à la voile.
Entre deux "remontes" devant Embraud, Manu partage une observation d'un passager des promenades batelières du samedi matin, un "homme de mer", qui réalisait avec étonnement les nombreux paramètres à prendre en compte pour une navigation à contre-courant d'une rivière et qui plus est, l'Allier... La direction du vent, sa force et ses à-coups, la direction et la force du courant, la profondeur des eaux, les vieilles souches traîtresses, les arbres de rives plus ou moins penchants, le mouvement des sables, le tout faisant un chemin de rivière beaucoup plus étroit que son lit initial pourrait faire croire, tout en gardant bien sûr à l'esprit les limites d'équilibre de la nacelle. Une infinité de données à intégrer pour espérer gagner avec l'aide d'Éole quelques horizons amonts et goûter la plénitude puissante d'un bateau emporté.
Echelle des crues pont du Veurdre : + 0,21 m.
Le jour de Noël, Manu et Thibaut font "marcher" à la voile Hors du Temps. Une fois franchi le délicat pertuis d'Embraud qui oblige une trajectoire fortement latérale aux risées, le futreau rejoint le lit du vent et le détroit Embraud / pont du Veurdre est rondement couvert.
Echelle des crues du pont du Veurdre : s'il est encore possible de la croire tellement elle semble inconstante en cette folle année ! Elle indique aujourd'hui une cote positive de 0,39 m.
Donc, en ce dix-neuvième jour de décembre de l'an deux mille vingt, le Lion d'Or, grande toue des Chavans, a levé l'ancre au gré d'un afflot attendu, pour la première fois depuis le 14 mars de cette année. Un voyage de remonte sans public, teinté de mélancolie, en direction de l'iconique Tour Barrieu.
Un peu avant 13 heures, rendu sur des terres plus hautes et espérées, le bateau fait "planche". Le grand chêne matérialisant l'ancien donjon veille encore la vallée comme la girouette à tête de dragon de la maison forte de Beauregard.
Dominique Robert " Le Do" s'en est allé comme un guerrier qu'il était. Sans crainte au mal, comme sur sa moto de cross ou bâton en mains à l'avant du pont de la grande toue. Il pouvait même faire peur ! Le genre de gars qui, en toute situation, donne tout. Son amour des autres et de la musique le poussait (comme Jacky Griffet) à offrir sans retenue réconfort ou louanges. Très sensible, il avait coeur de partager ses émotions et de convaincre.
L'Equipage l'embrasse très fort là où il est. Nous pensons à sa Fred et à sa famille.
Ci-dessous lors d'un beau voyage A/R Embraud / château de Meauce en mai 2017.
Laissons partir 2020 sans regret et prenons quelques instants de la hauteur. Emplissons nos poumons d'air pur avec des images étonnantes de Didier Perret. Il survole la rivière Allier et montre la formidable situation du domaine d'Embraud, chez les Chavans. Images captées en août dernier, au plus fort de l'étiage.
Echelle des crues : - 0,48 m.
Sans bien y regarder, la rivière pourrait paraître quelquefois monotone, du sable, du gravier et de l'eau qui suit sa pente. Pourtant il y a toujours quelques traces d'histoire qui patientent... Ci-dessus, ce pilot de seuil de pont ou d'hausserée. Ces solides pieux de chêne, disposés en nombre, constituaient la base de l'assise des anciens ponts ou contribuaient à la protection d'une digue. Le travail de sape incessant de la rivière fait qu'un jour ils se retrouvent sans brutalité "libérés", le pourquoi de leur pointe toujours acérée comme au premier jour.
Et puis, pour celui ou celle qui veut les voir, la rivière offre bien sûr ces sculptures, belles et émouvantes, qui transfigurent toute l'énergie du lieu et précisément celle d'anciennes crues.
Echelle des crues du pont du Veurdre : - 0,47 m.
Hier soir 19 novembre, Nelly en vigie batelière de permanence, communique l'information suivante : il manque un futreau au train chavan ! C'est La Gabrielle...
Evidemment, c'est la consternation car il est notre initial et plus ancien futreau. Il représente nos apprentissages et tant de beaux voyages. En ces jours courts de lumière, il nous faut remettre à demain sa recherche.
Malgré un confinement respecté, il est des cas de force majeure, car ces bateaux traditionnels sont un patrimoine associatif et bien au-delà.
Au gré d'un franc soleil d'hiver, nous nous embarquons, motivés, même s'il semble aux premières constatations à la lumière du jour que la commande a été coupée à l'aide d'un mauvais couteau.
Le bas niveau de la rivière ne permet pas de la remonter, donc notre bateau n'a pu que partir vers l'aval. Sans impulsion aucune, nous laissons notre nacelle voguer aux sons seuls de la nature. Chacun scrute les rives et embâcles, privilégiant le talweg (le courant principal) qui porte et conduit tout objet flottant. Mais, s'il n'est pas aisé voir impossible de remonter cette rivière aujourd'hui, cette incertitude est la même pour notre voyage de recherche... Pourrons-nous ramener notre bateau au pied d'Embraud, rue de la Chaîne ?
Voilà plus d'une heure que nous avalons et le doute de trouver et de revenir ne fait que s'accroître. Derrière nous, Ponsut, Mauboux, Bouy et ses dalles au vert intense et traîtresses en fond de rivière, que notre bateau râcle par instant. Nous devinons maintenant le triste pont de Mornay et toujours pas de Gabrielle ! Manu fait part d'une courbe aigue des flots prochaine qu'aucun bateau ne peut franchir seul ou mal accompagné. Le jour déclinant rapidement, il est décidé que ce serait le point limite de notre recherche.
Une fois encore Cécile semble l'apercevoir, c'est vrai que la silhouette est troublante mais non. Alors l'équipage déçu se décide pour la remonte qui sera lente et difficile. Les lumières de cette fin de journée sont sublimes et nous tentons de nous en suffire. A la vue de l'île du Ponsut, le pilote se rassure un peu de se retrouver en des encâblures plus communément empruntées, pour le chemin d'eau à choisir et pour la nourrice maintenant remplie de vide. Le bras de "mar", totalement ignoré à la descente, apparaît comme dans un lent traveling de cinéma... Puis, le profil de la fine silhouette de La Gabrielle gentiment posée sur un banc de graviers, comme si son charpentier Guy Brémard venait de terminer son ouvrage il y a 26 ans !
Ce contournement de l'île n'est pas le passage du courant majeur, néanmoins nous l'aimons beaucoup pour son allure sauvage. De vieux chênes encombrent son lit et lui confèrent cet aspect inquiétant. Il était impossible d'imaginer que notre futreau, à gré d'eau, ferait choix de cette route et encore moins de l'imaginer traverser sans bris toutes ces barrières de bois. Pourtant il est là sans même une blessure. Ce n'est pas la peine que nous insistions sur le fait que nos bateaux ont une âme. Celle de la Gabrielle est bien perceptible par cette volonté d'autonomie...
Après quelques minutes d'accordage entre Manu et Philippe sur la conduite à tenir pour que ce futreau retrouve son élément et de confirmer l'usure du cordage et non le vol, le voici maintenant à la remorque de Pénélope pour son retour vers la famille des bateaux chavans. Comme à l'accoutumée d'une mission incertaine et maintenant accomplie, un sifflet puissant retentit depuis la rivière vers Embraud, même si les murs sont une fois encore vides et sans musique.
Bientôt, les musettes résonneront à nouveau et les filles danseront...