Visite de Jean-Marc Benoît, batelier d'excellence du Bec d'Allier et charpentier de notre grande toue Le Lion d'Or. A midi, autour d'un petit canon de blanc de Riousse, Manu et Bibi évoquent leur navigation respective, ça frime un peu dans la cabane mais le batelier du Bec abat une dernière carte. Il revient de 5 jours de navigation sur la Vistule en Pologne ! Une rivière sauvage comme l'Allier, avec de grands bancs de sable en déplacement permanent, mais 4 à 5 fois plus large.
Une légère entrée d'eau entre deux planches, dans la levée, a rendu nécessaire la pose d'un palâtre. Rappelons que cette procédure consiste à clouer une plaque de métal ou de bois qui comprime une feutrine enduite de goudron sur la "blessure" intérieure du bateau. Des gestes de maintenance sans âge qui font partie de la navigation en rivière. Aux côtés de l'image de Saint-Nicolas, de la pipe, du tabac, du couteau et de la chemise de rechange, le marteau, les clous et un vieux linge enduit constituaient le lot de la "cassette" du marinier. L'opération d'aujourd'hui est délicate par sa situation, obligeant une mise en forme du pansement.
La rivière, tout en bas, belle et porteuse, nous appelle, nous attend... mais aujourd'hui nous ne ferons que la voir venir et partir. Il faut se mettre à l'ouvrage, au soin de la toue Pénélope qui sèche à l'abri du chantier depuis fin décembre dernier. Une couche unique pour le fond intérieur et une première couche pour les bordés. La semaine prochaine, nous calerons la bête sur le côté, comme on peut le voir sur les estampes, avec des bastaings régulièrement répartis.
Passagère "première classe" du grand futreau chavan, la journaliste Corinne Pradier.
En juillet 2016, l'équipage des Chavans effectuait pour le magazine Détours en France, sous un soleil plus que généreux, une descente de rivière au départ de Port Barreau.
Vient de paraître le reportage de ce voyage batelier. La vieille maison d'Embraud (Château/Allier) y est aussi à l'honneur, ainsi que la Maison de la Batellerie (Le Veurdre).
Départ de Port Barreau : Thibaut en charge des "écueils en rivière" Jean-Baptiste en "homme de coue", Manu à la propulsion "en marchant" Jamais sans mon Saint-Nicolas ! Notre passagère, Corinn...
Anse de la rue de la Chaîne : depuis la dernière tempête on y voit rassemblée la gamme traditionnelle des bateaux de la rivière Allier. A gauche, le nez d'une grande toue de 13 mètres, au milieu, un fin futreau de 8 mètres, à droite, le "cul carré" d'un petit bachot de 5 mètres.
La toue : construite en 2013 par le charpentier Jean-Marc Benoît à Cuffy au Bec d'Allier.
Le futreau et le bachot : respectivement construits en 1998 et 1992 par le charpentier Guy Brémard à Saint-Germain-sur-Vienne.
Par ce magnifique après-midi, Jacques Paris a rendez-vous avec Murielle sur le Lion d'Or. Un échange de paroles sollicité pour un moment de paix entre deux terres, une parenthèse dans l'affairement brutal du quotidien.
Par respect pour l'instant, l'équipage prend distance sur la grève. Rappelons que le premier avril prochain il ne sera plus possible d'aborder cet îlot dans un souci de protection des fragiles couvées de sternes. De fait, ce sera aussi le dernier moment pour ramasser bouteilles et plastiques divers qui jurent en ce lieu.
Mais l'après "hautes eaux", ce n'est pas seulement le rebut des villes de l'amont, le plus souvent elle consacre de nouvelles perspectives pour autant que l'on veuille les voir. Ci-dessous, cette pointe de grève aura pour l'année à venir une figure de proue de "land art" puissante, tout droit sortie d'un bestiaire de Hayao Miyazaki.
Voici le temps des tempêtes ! A midi, après trois coups de tonnerre, le rideau des vents se lève, les voici courants, puissants, ceux qui font douter d'être entre deux terres à cet instant... L'automatisme des gestes et de la connaissance des lieux ramènent sans perte de temps la grande toue à l'abri de la colline. Une commande de retenue arrière est tendue car bientôt le souffle tournera sans faiblir du couchant au septentrion.